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par LASEROLOGUE » 23 mars 2013, 23:53
Sur Marc Linski et son décès (en février 1996...je m'en souviens très bien , j'ai appris sa mort en débarquant à Nice après une traversée en ferry Corse - Continent copieusement secouée....et à cette époque les prévisions météo étaient déjà largement fiables à échéance 4 jours)...il y a un article de Libération qui mérite d'être lu attentivement: Au delà de l'émotion et de l'hommage dû à un péri en mer, il y a des mots assez peu flatteurs et des guillemets bien placés, probablement par un journaliste ayant quelques doutes sur le méthode Linski:
Visage buriné, yeux marron et cheveux courts poivre et sel, sa
bobine figurait en bonne place dans les pages pub de toutes les revues nautiques. La légende était limpide: «Marc Linski, la maîtrise rapide de la grande croisière.» Et quelques lignes de plus pour décider ceux qui n'osaient encore franchir le pas et jugeaient que le royaume de la haute mer leur était inaccessible: «Pour brûler les étapes de l'enseignement traditionnel de la voile. Pour apprendre vraiment la mer et savoir la respecter.» Marc Linski était une référence dans le milieu de la voile. Adorée ou haïe, son école maintenant installée à Calvi venait d'avoir trente ans et a bien contribué à bousculer le conformisme de l'époque.
Parti jeudi de Corse par un temps radieux, le navigateur a disparu vendredi soir en mer dans une énorme tempête dont la Méditerranée a le secret, avec des creux de plus de huit mètres et quarante noeuds de vent. Un cargo croisant au large de l'île de Porquerolles a repéré Karma, le voilier démâté de Marc Linski. Hélitreuillés au-dessus du bateau à la dérive, les sauveteurs ont alors découvert le corps sans vie de Jacques Linski, 74 ans, le père de Marc, traîné derrière le bateau, accroché avec son harnais.
Hier le Crossmed (Centre opérationnel de surveillance et de sauvetage en mer) avait décidé de reprendre les recherches. Un Bréguet Atlantic et un Super-Frelon ont recommencé à sillonner la zone entre la Corse et le continent mais sans grand espoir de retrouver le canot de sauvetage insubmersible sur lequel le navigateur pourrait s'être réfugié. Marc, 50 ans, n'était pas du genre à se laisser impressionner par les éléments et à abandonner un bateau.
C'est au milieu des années 60 que Marc Linski a commencé à enseigner la voile au large à bord des fameux Frioul, grands monocoques de 14 mètres. Il en aura bientôt six et se retrouve vite sur la paille, sans le sou. Dans les années 70, ses équipiers s'appellent Alain Gabbay ou Florence Arthaud qui , hier, se sont d'ailleurs tous deux rendus à Calvi. Il touche à la compétition et la Transat anglaise devient son aire de jeu favorite. En 1968, roulé par une déferlante, il va passer dix jours à pomper l'eau qui s'engouffre dans son monocoque avant d'être recueilli épuisé au large de la Corogne. En 1972, toujours au départ de la Transat anglaise, il ne pardonnera pas à Jean-Yves Terlain de l'avoir abordé avec Vendredi 13 et de lui avoir arraché son balcon arrière: il le percute volontairement dans la minute qui suit.
Ces dernières années il s'était entièrement consacré à son école de formation à la course croisière, à Calvi, et à son unité de charter.
Pascal Herold, 7e de la dernière Route du rhum, parle de son ami: «Ce sont tous les mecs bien qui s'en vont. Après Olivier Moussy, Daniel Gilard, c'est Marc Linski. Marc c'était un inventeur intransigeant avec une grande gueule qui lui a causé pas mal d'inimitiés. A la fin des années 60, il a fait partie de ces marins, rares à l'époque, qui ne supportaient plus qu'on fasse croire que la voile était réservée à une élite. Il a été un des principaux artisans de sa démocratisation. Dans le domaine de la course, il n'a cessé de se battre contre les instances internationales pour simplifier à l'extrême les règles de course. Il poussait son souci de simplification jusqu'au bout: deux bateaux qui se percutaient devaient être tous les deux disqualifiés, comme tout bateau franchissant la ligne avant le coup de canon. C'était son côté un peu facho de la République, un peu Jules Ferry de la voile.»
Marc Linski, celui qu'on surnommait le «guide de haute mer» espérait être au départ de la prochaine transat anglaise, l'Ostar, à la barre de son nouveau 40 pieds. Hier soir, les recherches ont été arrêtées